2014 / Less is More
DOSSIER DE PRESSE - PRESS RELEASE
La Galerie Vieille du Temple présente l'exposition « Less is more » titre emprunté au fameux adage de l'architecte Mies Van der Rohe du 16 octobre au 19 novembre 2014.
Cette exposition est un dialogue inédit entre Lucien Hervé (1910 - 2007) et Illés Sarkantyu. Ces deux photographes nés en Hongrie, que plus de 60 ans d'âge séparent, trouvent dans cette exposition un espace d'échange.
Illés Sarkantyu propose une relecture du travail de son aîné à travers le prisme de sa propre sensibilité artistique.
Né en 1977 à Budapest, Illés Sarkantyu étudie à l'Université d'art appliqué Moholy-Nagy où il enseigne ensuite pendant deux ans, avant de venir s'installer à Paris en 2002. Il se lance alors dans la réalisation d'une série de portraits d'artistes et intellectuels hongrois vivants en France. C'est dans ce contexte qu'il rencontre le photographe Lucien Hervé en 2003.
Lucien Hervé de son vrai nom László Elkán arrive de Hongrie à Paris en 1929. Avant la guerre, bien qu'il soit attiré par la musique et la peinture, il est d'abord modéliste pour gagner sa vie dans la haute couture et commence à photographier avec Nicolas Müller pour Marianne Magazine. Quand Müller quitte la France, il continue dans cette voie. Militant actif à la CGT et au Parti Communiste, c'est en cohérence avec ses convictions qu'il rejoint dès 1942, après son évasion du camp de prisonniers de guerre à Hohenstein, les rangs de la Résistance et le Mouvement National des Prisonniers de Guerre et Déportés, sous le pseudonyme de Lucien Hervé. Sa carrière prend un tournant décisif après sa rencontre avec Le Corbusier en 1949. Photographe attitré de l'architecte jusqu'au décès de ce dernier en 1965, Lucien Hervé est alors reconnu comme l'un des plus grands photographes d'architecture, il collabore entre autres avec les architectes Alvar Aalto et Oscar Niemeyer.
« La singularité d'Hervé, elle tiendrait à sa grande rigueur, à son économie de moyen et à la façon, tout à fait originale, dont il se tient sur la limite entre abstraction et figuration ; celle avec laquelle il cherche, par delà une apparence extérieure des choses, à rendre compte d'une idée, d'un dessein et à faire que chaque expérience de la vision soit saisie dans une réflexion plus générale. »
(Quentin Bajac, conservateur en chef de la Photographie au MOMA)
Peu après la mort d'Hervé en 2007, Illés Sarkantyu est appelé par Judith Hervé pour l'aider à continuer l'exploitation de l'œuvre de son mari et de leur fils décédé, Rodolf, également photographe. Sarkantyu photographie, classe et numérise, les chemises de rangement et les planches contacts se trouvant dans le studio, dans un but purement utilitaire.
En 2010 à l'occasion d'une commande d'un film d'entretiens sur Hervé, Sarkantyu se trouve face à une question difficile : comment évoquer l'homme alors qu'il n'est plus ?
Il redécouvre alors ses photographies de chemises de classement d'Hervé, émouvantes avec leurs annotations, perforations, pastilles colorées et bouts de scotch qui retracent les étapes de travail de Hervé mais aussi sa créativité quotidienne.
Il retourne dans l'atelier de Hervé et découvre aussi intercalaires, objets poétiques, énigmatiques et toutes ces petites inventions intimes qui retracent en filigrane, l'histoire et la sensibilité de Lucien Hervé en contraste avec l'image très construite que l'on peut avoir de l'œuvre du photographe.
Sarkantyu, tour à tour enquêteur, historien ou témoin avisé, exhume les objets du studio d'Hervé qu'il revisite à travers ses propres photographies. Il n'a rencontré que très brièvement Lucien Hervé, mais en travaillant sur son œuvre il a su approcher au plus près, sa pensée et ses intentions artistiques.
Cette exposition met en regard les photographies de Sarkantyu et celles de Lucien Hervé avec l'ambition de créer un dialoque inédit.
« Deux images qu'on rapproche produisent de la pensée. Ce n'est pas seulement l'image et sa légende mais la distance qui les sépare qui dessine, ouvre, un espace pour penser. »
Cette réflexion formulée par Georges Didi-Huberman à propos de l'Atlas Mnémosyne d'Aby Warburg trouve un puissant écho dans la collection d'images que compose Illés Sarkantyu.
Cet « espace pour penser » ouvre ici le territoire inexploré de l'intime. L'exposition révèle à la fois la méthode de travail de Lucien Hervé, sa découpe au ciseau du superflu : « Less is more », mais aussi son œil intraitable, qui de manière presque inconsciente, fait du moindre objet une composition abstraite.
Ce jeu de mise en regard dévoile aussi le travail d'un jeune artiste hongrois :
Illés Sarkantyu, dans sa pratique artistique, se réapproprie des images et, avec un « effort de mémoire », réécrit une nouvelle histoire aussi personnelle qu'universelle. Ici, tout en dévoilant l'ampleur de la créativité de Lucien Hervé, il évoque aussi sa situation propre en marge des limites du champ photographique.
Ce tête à tête entre deux artistes, trouve son accomplissement dans la mise en regard de leurs deux œuvres qui se répondent et s'exaltent mutuellement, et qui finissent par ne plus avoir besoin de prétexte pour dialoguer. On est en face d'un véritable échange entre deux grands artistes.